jeudi 31 octobre 2013

Fatou DIOME : « Au nom de tous les bâtards du SENEGAL …»


Fatou DIOME Les folies de Fatou DIOME, on peut résumer ainsi la sortie de l’écrivaine ce mercredi face au public au Goethe Institut. Elle était l’invité du Rendez-vous littéraire mensuel de l’Institut. C’était pour présenter son dernier roman intitulé Impossible de grandir publié en mars 2013. Une œuvre autobiographique où elle dénonce le regard ingrat que la société porte sur les enfants nés hors mariage et l’hypocrisie de la société sénégalaise.
Echanges avec le public
Il faut avoir une certaine liberté pour tirer d’une certaine manière sur des valeurs qu’on peut considérer comme rétrogrades. Mais Fatou DIOME nous dit qu’avec sa liberté de français elle peut mettre le doigt dedans. L’écrivaine est très marquée par le regard, les insultes, les brimades, les remarques de parents et proches durant son enfance parce qu’étant un enfant né hors mariage. Contrairement à la conception générale qu’on peut faire d’un tel état de fait, elle se présente comme « un enfant conçu dans un amour total ». Elle est très fière d’être la fille d’un homme « un Yékini de son époque comme tous les anciens lutteurs, des rock stars de leur époque » et elle parle de sa maman comme « une midinette qui aimait une rock star ». Hier comme aujourd’hui, elle n’en veut nullement à ses parents, juste demander aux hommes de prendre toujours leur responsabilité, « car les femmes ne tombent pas enceintes en buvant de l’eau de pluie mais c’est parce que les hommes y vont », dit-elle. Fatou DIOME de dire qu’elle en a marre du regard porté sur les enfants nés hors mariage. Dans ses échanges avec le public, elle explique que le premier jour où une tante à elle l’a traitée de bâtarde, elle est partie regarder le dictionnaire pour savoir la signification. Comme aussi cette gifle reçue d’un parent après son passage sur le plateau d’une télévision à la suite de la publication de son premier livre, « tu dois vivre dans la discrétion bâtarde au lieu d’écrire des livres », Fatou DIOME avait pourtant plus de trente ans. A tous ces gens et à tous ceux qui pensent comme eux, l’écrivaine de répondre, « je vais encore écrire des livres en parler et même pisser sur leur tombe, je les emmerde ». Fatou DIOME de dire « je parle au nom de tous les bâtards du Sénégal » avant d’ajouter  « à tous les enfants qui vont naître après les navétanes » vous avez une tante qui pense à vous. A côté de ce problème d’enfant né hors mariage, il y a aussi la réalité du  mariage même. Là l’écrivaine demande l’élimination de la dot pour ne pas donner l’impression que les filles sont achetées. A ces filles, elle rappelle ce que disait sa grand-mère, « Fatou, la chose là (le sexe), là où elle se trouve si quelqu’un y parvient c’est qu’on lui a donné ». Et comme pour dire que des réalités bloquent encore les relations amoureuses naturelles, elle soutient que « généralement les filles tombent enceintes parce qu’elles sortent avec des gens  qu’elles n’osent pas présenter à leurs parents ».
Biographie…
Les difficultés du mariage et du divorce sont connues par Fatou DIOME. A 22 ans elle tombe amoureuse d’un français et se marie avec lui contre la volonté des parents de l’écrivaine qui ne sont pas d’accord. Elle parle malheureusement « d’un prince charmant devenu crapaud une fois en France » et d’une belle mère qui lui dit « je n’ai rien contre les noirs mais je n’en veux pas chez-moi ». Seulement pour Fatou DIOME, « le divorce c’est une vie qui se termine et une autre qui s’ouvre si l’on veut rester optimiste ». Pendant six ans elle fait des ménages pour vivre et financer ses études. Les travaux domestiques ne sont plus un problème pour Fatou DIOME car pour elle « ceux qui n’ont pas le choix doivent  toujours vivre de leur sueur ». L’écrivaine d’aujourd’hui a travaillé comme bonne hier à Mbour, à Dakar et même en Gambie pour financer ses études. Pour une anecdote, elle réclame toujours ses 7500FCFA à une dame de Hann Montagne à Dakar, une dette qui date de 1985. Sa patronne n’avait pas payé parce que Fatou avait juste abandonné le boulot avant la fin du mois. Aujourd’hui parlant de toutes ces filles, ses parents sérères notamment qui quittent le village pour travailler en ville, elle interpelle parents et autorités car « l’école, les études, la formation sont les seules chances qu’on peut donner aux enfants pour le développement de ce pays ». Très courageuse et combattante, Fatou DIOME est installée aujourd’hui à Alsace en France, elle est chargée de cours, poursuit études et recherches à l’Université de Strasbourg où elle termine son Doctorat ès Lettres sur Le Voyage, les échanges et la formation dans l’œuvre littéraire et cinématographique de Sembène Ousmane.
Son œuvre
La Préférence nationale, recueil de nouvelles (2001), Le ventre de l’Atlantique, roman (2003), Les loups de l’Atlantique, nouvelles (2002), Kétala, roman (2006), Inassouvies, nos vies, roman (2008), Le vieil homme sur la barque, récit 2010, Celles qui attendent, roman (2010), Mauve, récit (2010), Impossible de grandir, roman (2013). Pour  Fatou DIOME en matière de littérature, ce qui l’intéresse c’est la philosophie des écrivains, d’ailleurs « comme je suis une bâtarde, je mange à tous les râteliers » dit l’écrivaine.
La présentation du dernier roman est faite devant des parents, des frères et sœurs. Dans une parfaite harmonie avec son œuvre, elle a récité presque toute l’introduction du livre sous forme de poème avec parfois de la musique et des gestes de danseur en parlant parfois wolof et sérère. Salie c’est l’héroïne du roman, SALIE avec « e » et nom avec « y », Salie comme celle qu’on a salie ou souillée explique Fatou DIOME. Une  absence nominale pour parler juste de la naissance, elle peut concerner la fille comme le garçon, ici c’est Fatou DIOME, la fille de la petite île de Niodior qui demande qu’on la laisse  vivre et  mourir avec ses folies si c’est ce qu’on pense de son honnêteté et objectivité sur les critiques contre sa société.
Pressafrik

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